Méditation de Don Louis-Hervé GUINY

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« Seigneur, donnez à la France les nouveaux St Vincent de Paul dont elle a besoin »

La plus grande grâce que Dieu ait faite à la France meurtrie, au temps de Richelieu et de Mazarin, est de lui avoir donné saint Vincent de Paul (1581-1660).

Pour panser les plaies du pauvre peuple, il fallait un homme qui unît en lui le meilleur du paysan et du prêtre : le bon sens, l’humilité, l’activité tenace, la prudence, la patience, et pénétrant le tout, une charité sans égale. Lui aussi est frappé de la différence entre le nombre de prêtres et la misère qu’ils sont chargés d’encadrer, d’édifier, d’enseigner et de consoler. C’est qu’il y a trop de mauvais prêtres.

« Les mauvais prêtres » : que de fois le mot revient sur les lèvres du fondateur des lazaristes ! Il sait bien que partout en France, il y a des prêtres fervents, mais les autres l’obsèdent par leur nombre. Fort de ses relations avec un certain nombre d’évêques, il tombe d’accord sur l’impossibilité d’améliorer la masse des mauvais prêtres et sur la nécessité « d’appliquer le remède à la source du mal », en s’efforçant « de donner l’esprit ecclésiastique et d’enseigner les devoirs de leur état à ceux qui veulent entrer dans les ordres. C’est le début d’une grande aventure en France.

Le séminaire devient la nouvelle matrice du clergé français. Saint Vincent de Paul écrira « c’est un chef d’œuvre en ce monde que de faire de bons prêtres ». C’est d’autant plus important pour lui qu’il éprouve l’intuition et la conviction que les peuples sont à l’image de leurs pasteurs. Il écrit à un fils : « Dieu vous bénisse, mon frère ! C’est bien fait de demander à Dieu qu’il fasse de bons évêques, de bons curés, de bons prêtres, et c’est ce que nous devons tous demander : tels sont les pasteurs, tels sont les peuples. On attribue aux officiers d’une armées les bons et les mauvais succès de la guerre ; et on peut dire de même que, si les ministres de l’Eglise sont bons, s’ils font leur devoir, tout ira bien ; et au contraire, s’ils ne le font pas, qu’ils sont cause de tous les désordres ». Il dira aussi qu’un « bon prêtre est une grande chose ! Que ne peut faire un bon prêtre ! Quelles conversions ne peut-il pas procurer, des prêtres dépend le bonheur du christianisme ».

Avec lui et après lui, le cardinal de Bérulle, Monsieur Olier, St Jean Eudes, St Louis-Marie et tant d’autres vont contribuer à la formation de ce nouveau clergé vertueux, zélé et charitable. A leur place, ces maîtres de l’Ecole Française de spiritualité ont permis cette réforme pastorale, forte d’un redressement moral et d’un esprit missionnaire dont les français vont bénéficier. C’est la France qui va bénéficier de cette réforme. Alexis de Tocqueville écrira bien plus tard : « je ne sais si, à tout prendre, et malgré les vices de quelques-uns de ses membres, il y eut jamais dans le monde un clergé plus remarquable que le clergé catholique de France au moment où la révolution l’a surpris : plus éclairé, plus national, moins retranché que les seules vertus privées, mieux pourvu de vertus publiques et , en même temps, de plus de foi…J’ai commencé l’étude de l’ancienne société plein de préjugés contre lui, j’en suis sorti plein de respect. »

Lors de la Révolution Française, l’épopée des prêtres cachés, des exilés, des martyrs, de ce qu‘on peut bien appeler « l’Eglise Française du silence » est le signe le plus fort de cette résistance pacifique. Que d’âmes d’enfants, Jean-Marie Vianney et tant d’autres, furent à jamais marqués par ces existences clandestines et héroïques. C’est cette transmission d’un idéal de sainteté sacerdotale authentique qui permettra au XIX ème et au début du XXème à tant de pasteurs et de missionnaires dans le monde entier, dans un climat souvent anticlérical de favoriser l’essor de l’Eglise.

C’est ce même désir qui anime le Cardinal Suhard, au sortir de la seconde guerre mondiale, qui entend lui aussi à sa place contribuer à la réforme du clergé pour le bien de la France : « Comme le Christ, le prêtre apporte à l’humanité un bienfait sans égal : celui de l’inquiéter. Il doit être le ministre de l’inquiétude, le dispensateur d’une soif et d’une faim nouvelles. Comme Dieu, il appelle la faim sur la terre. Il ne s’agit pas ici c’est évident, de semer une peur maladive dans des consciences déjà exacerbées par la vie moderne. L’inquiétude que doit semer le prêtre, c’est cette crainte de Dieu, ce tourment de l’infini, qui a fait pousser aux mystiques, et aux penseurs de tous les temps, ces cris d’appels si bouleversants. La révolte qu’il prône, c’est l’insurrection des consciences ; l’ordre qu’il vient troubler, c’est le calme apparent qui couvre les iniquités et les haines. Comme le héros et le Saint, le prêtre dans la cité, n’est pas un citoyen passivement docile ; il n’a point taille commune… Prophète du Dieu Vivant, il n’admet plus le repos qui serait la mort : il se doit d’être l’artisan du devoir, du jaillissement, dans l’intimité des personnes comme dans le déroulement de l’histoire. Et dès lors, on peut le dire sans contradiction : sa manière des semer l’ordre, c’est de le mettre en cause ; sa façon propre d’obéir aux lois des hommes, c’est d’en appeler sans cesse à la loi de Dieu ».

Dans la France d’aujourd’hui et de demain, les nouveaux « St Vincent de Paul » sauront à leur place, toute leur place et rien que leur place favoriser un élan missionnaire.

Don Louis-Hervé GUINY
Don Louis-Hervé GUINY Prêtre de la Communauté Saint-Martin depuis le 25 juin 2000. Responsable de la formation depuis 2004 
25 commentaires sur “Méditation de Don Louis-Hervé GUINY
  1. B de La Bonnellière dit :

    Campagnard, je constate que les prêtres sont de plus en plus rares dans les paroisses, que leur ministère est de plus en plus difficile à assumer (parfois 1 prêtre pour 30 paroisses !) En conséquence, les fidèles désertent les église et pratiquent de moins en moins. Dramatiquement, la moyenne d’âge augmente.

    Le prêtre qui agit en lieu et place du Christ absout et pardonne les péchés comme le Christ lui-même pardonne et absout.

    Lorsque le prêtre prend conscience de cette mission, le rayonnement du sacerdoce est si grand que le nombre ne compte plus. Le saint curé d’Ars, le padre Pio et d’autres encore en firent la démonstration. Quelle responsabilité !
    Vers 1960, les églises se sont vidées progressivement et les discours humanistes n’y firent rien.

    O mon Dieu donnez-nous de saints prêtres, pour rappeler aux pécheurs qu’ils ont une âme dont la finalité est en vous !

  2. PALIARD dit :

    Quel texte brillant ! Merci mon Père, nous voyons se lever aujourd’hui toute une génération de jeunes prêtres saisis par la grâce et des missionnaires étrangers, polonais, africains, asiatiques qui nous remettent sur le droit chemin. Ils n’ont aucun complexe à évangéliser, à imiter le Christ et aiment tendrement Marie. Loué soit le Seigneur pour ces saints prêtres qu’Il nous donne pour nos enfants.

  3. colombe dit :

    Frères et sœurs en Christ , je me permets de vous demander de prier pour mon fils qui est prêtre, et comme tout prêtre il a besoin de prières et de soutiens .Je vous en remercie et que DIEU vous benisse et vous garde dans la paix des enfants de DIEU .

  4. Epsilon dit :

    Passionnante perspective, qui ouvre des horizons qu’on croyait fermés. Pour tous ceux qui ont la responsabilité d’instruire les nouvelles générations, et en particulier les futurs cadres.

    En reflet de cette construction du 17ème, ce que nous pouvons, devons faire aujourd’hui, c’est semer des questions, ouvrir au sens des actions entreprises, des décisions au service des hommes, et pourquoi pas à la transcendance. Tout ce que le matérialisme, jouisseur, marxiste ou autre, échoue à obtenir par ses incantations à de fades et vagues “valeurs” indéfinies.

    C’est très facile, pas besoin de brandir un étendard, de simples questions régulièrement semées sur l’Homme, le Bien et le Mal, la Vérité, la Justice, la responsabilité… Et vivre nous-mêmes en accord avec ces idées: la neuvaine n’est que le début d’un flot irrésistible, guidé par Marie et béni par Notre Seigneur.

  5. Jacqueline dit :

    Bonjour.

    Oh, comme vous avez raison, j’aime beaucoup dans la règle de ST Benoit et ailleurs, le pape en a parlé cette semaine ….Renonçons aux bavardages…C’est un acte difficile, mais bénéfique, bavardez sur nos semblables, sur nos prêtres…C’est difficile à tenir, les mauvais prêtres font tant de ravages…Mais nous avons de merveilleux prêtres qui donnent toutes leurs vie à Dieu et celà coule sur nous…Alors prions pour eux, beaucoup de prières, pour avoir de st prêtres…Et si un manque à son devoir, allons voir ailleurs, ne quittons pas l’Eglise pour autant…Ailleurs on nous encouragera à prier pour lui…Dieu fait des merveilles…Dieu nous donnes des ouvriers de qualités, savons nous tenir, quand nous avons un saint prêtre devant nous il veut nous guider vers le Père…Acceptons nous les efforts à faire ? Appuyons nous sur nos prêtres, sur le ST Père François…Prions, prions sans relâche…Avec simplicité et convictions…

  6. André D dit :

    Merci père. Rappelons-nous les mots de la Vierge Marie à Medjugorje: “Au lieu de critiquer vos prêtres, priez pour eux et aidez les”. Leur tâches est difficile. Essayons de ne voir en eux que le représentant du Christ, afin de ne jamais juger l’homme. En union de prière.

  7. Mirèn dit :

    Comment ne pas ajouter mon nom, après avoir lu tout ce qui précède, pour admirer chacun de vous, alors que vous êtes tous d’accord !
    Comme je le suis aussi à 100 pour 100 au sujet des prêtres, à commencer par Don Louis-Hervé !
    Quelle grâce nous recevons par vous tous, et quel appel à la prière

    Merci de votre courage.

  8. Marie dit :

    Bravo Père pour cette méditation qui vient me confirmer ce que je
    pense nous avons vraiment besoin de saints prêtres pour la jeunesse qui n’a plus qu’une vague connaissance de la religion, suite à un catéchisme très superficiel. Il leur faut c’est évident de saints prêtres pour modèle qui leur donne un bon enseignement.Merci encore.

    • Chenaux Patric dit :

      Comme vous avez raison. Je vous rejoins sans réserve aucune. Combien le Catechisme est important. Et pour nous aussi à le lire le méditer toute notre vie. Quelle richesse que Le Catéchisme de l’Eglise Catholique ou celui des évêques de France.

  9. colombe dit :

    Un grand merci a vous Don Louis Hervé, pour votre belle méditation sur les prêtres et leurs vocations.Je confirme personnellement et j’approuve votre discernement a ce sujet,il est vrai que nous avons besoin plus que jamais de bons et saints prêtres, ils sont les piliers de notre Église. Malheureusement certains ne sont plus a la page. Je ne veux pas critiquer mais je constate tout simplement que certains vont contredire leurs collègues ce qui creuse de plus en plus le fossé de ceux qui sont en recherche ou qui sont perdus ou qui souffrent sous le poids de la douleur. Malheureusement nous nous trouvons parfois devant un mur et pourtant ils représentent le Christ sur la terre. Quand je pense a tous ces prêtres qui ont donné leur vie par amour du Christ et qui sont allés jusqu’au bout de leurs engagements.Je vous recommande de lire le livre de Guillaume Zeller: la baraque des prêtres Dachau 38-45 ce fut le plus grand cimetière de prêtres catholiques du monde.Certes ils n’ont pas tous tenu mais certains sont morts martyrs au non de leur Foi.Prions pour nos prêtres en place mais aussi et surtout pour avoir de sainte vocations.religieuses et surtout de saints prêtres pour nous perpétrer le sacrement de l’amour,. Nous avons cette chance la alors profitons en pleinement et seule la prière nous sauvera du gouffre ou nous risquons d’aller.

  10. Chenaux Patric dit :

    Merci mon Père pour cette méditation. Combien l’Eglise de France a en effet besoin de ces prêtres qui comme les saints que vous avez cités, exercent leur sacerdoce en ayant comme uniques soucis la Sainte Gloire de Dieu et l’édification du peuple de Dieu. Nous pouvons nous imaginez leur charge, car c’est une charge. Mais pour l’exercer, ils ont l’aide de Notre Seigneur Jésus Christ et de sa divine Mère. Il leur faut aussi des évêques vraiment consacrés qui cherchent autant qu’eux la gloire du Seigneur et la sainteté des brebis dont ils ont la charge. Et en ce moment, nous avons le Saint Père au gouvernail de l’Eglise qui nous montre l’exemple.
    L’Eglise de France manque de vocations? Et alors? Ne pouvons-nous pas prier le Maître de la Moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson? Il est le Maître alors n’hésitons pas à le prier, comme nous le faisons à la fin du chapelet, et de tout notre coeur:
    Seigneur, donne-nous des prêtres,
    Seigneur, donne-nous des saints prêtres,
    Seigneur, donne-nous beaucoup de saints prêtres,
    Seigneur, donne-nous beaucoup de saintes vocations religieuses.

    Si nous demandons au Seigneur de tout notre coeur, en voulant nous aussi devenir saints, comme le Père céleste est saint, alors, nous verrons se lever des nouveaux Saint Vincent de Paul.

  11. pierre dit :

    Un grand merci.Enfin, la reconnaissance du vrai rôle du prêtre/ Nous avons tant besoin de vérité. D’être enseignés, avoir des consciences éclairées et savoir que seuls les prêtres peuvent faire cela.Il y aurait moins de tensions avec les laîcs si on acceptait ainsi d’être dirigés.

  12. Marie Claude dit :

    Merci Père Guiny pour cette profonde méditation,pleine d’enseignements;
    En effet,nous,fidèles,sommes un troupeau et nous avons besoin d’un bon berger,surtout dans les passages difficiles que nous traversons.Dans notre pays,l’individualisme,le relativisme,le matérialisme,l’attrait pour la jouissance immédiate sont autant de pentes abruptes,de ravins profonds,de chemins sans issue,qu’un bon prêtre,tel un berger averti,doit savoir éviter,contourner,pour mener son troupeau sur la bonne voie.
    C’est le sens que nous donnons à notre prière,quand nous invoquons le Seigneur:
    -Donnez-nous des prêtres,donnez-nous beaucoup de prêtres,donnez-nous beaucoup de Saints Prêtres!

  13. Bossard dit :

    merci pour cet article
    A propos des prêtres martyrs, il y en a eu dans des lieux qu’on aurait pu penser éloignés de la tourmente révolutionnaire. Dans un village des Vosges, on trouve une plaque à la mémoire du curé déporté et mort en Guyane. Cf”L’abbé Rouyer; essai sur la persécution révolutionnaire dans le district de La Marche.Saint Dié, 1908″ scanné par une université américaine

  14. Gauer dit :

    C’est ce même désir qui anime le Cardinal Suhard, au sortir de la seconde guerre mondiale, qui entend lui aussi à sa place contribuer à la réforme du clergé pour le bien de la France : « Comme le Christ, le prêtre apporte à l’humanité un bienfait sans égal : celui de l’inquiéter. Il doit être le ministre de l’inquiétude, le dispensateur d’une soif et d’une faim nouvelles. Comme Dieu, il appelle la faim sur la terre. Il ne s’agit pas ici c’est évident, de semer une peur maladive dans des consciences déjà exacerbées par la vie moderne. L’inquiétude que doit semer le prêtre, c’est cette crainte de Dieu, ce tourment de l’infini, qui a fait pousser aux mystiques, et aux penseurs de tous les temps, ces cris d’appels si bouleversants. La révolte qu’il prône, c’est l’insurrection des consciences ; l’ordre qu’il vient troubler, c’est le calme apparent qui couvre les iniquités et les haines.